Pourquoi l'Arizona ?

Cet article est le premier d'une série à travers laquelle je (Christophe Monplaisir, ou Genévrier) souhaite vous faire partager mon expérience de la vie chez les indiens Navajos. Ces trois dernières années, j'ai passé près de trois mois par an dans une famille Dine' (le nom des Navajos dans leur propre langue), dans un endroit isolé et difficile à atteindre de la réserve Navajo en Arizona : Black Mesa. 

Après y avoir vécu au printemps durant l'année 2010, en été en 2011, puis en automne en 2012, je suis sur le point d'y retourner pour un quatrième voyage, hivernal cette fois-ci. La vie des indiens traditionnels étant encore très rythmée par les saisons, le choix d'y retourner toujours à des saisons différentes était dès le départ délibéré : en effet, les variations de température, d'hydrométrie et de vent (pour ne citer qu'elles) influencent grandement la faune et la flore de la Mesa, et donc les humains, qui y entretiennent encore parfois des relations intimes avec la nature. 

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Traversée de l'Atlantique 

Mars 2010 : me sentant inadapté à un parcours à l'université, je décide de profiter de cette fin d'année pour réaliser un rêve de petit garçon : rencontrer des Amérindiens vivant encore proches de la nature. Reste maintenant à trouver un moyen d'établir le contact avec des Indiens. 

Pour cela, j'écris à Derrick Jensen, un auteur américain dont les ouvrages avaient bouleversé ma vision du monde lorsque j'étais encore au lycée. Sa réponse ne tarde pas : il me donne le nom d'une association, Black Mesa Indigenous Support (BMIS), qui aide des gens du monde entier à rentrer en contact avec des familles indiennes sur Black Mesa, un plateau de steppes semi-désertiques, situé à environ 120 km du Grand Canyon.

Je finis par échanger avec un ancien membre de BMIS qui, intéressé par mon dossier, me propose de me présenter à la grand-mère Navajo qui l'accueille lorsqu'il va sur la Mesa. Les photos qu'il m'envoie confirment mon intuition : c'est là que je souhaite aller.

Après avoir réglé les détails administratifs, me voilà prêt à partir, le 29 mars 2010, absolument inconscient du gouffre qui sépare Black Mesa de tout ce que j'ai connu auparavant, et sans même savoir que la vieille dame qui va m'accueillir est une femme-médecine, passionnée par les plantes sauvages qu'elle utilise depuis plus de 70 ans et qui ne parle que sa langue natale : le dine'.

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Arrivée à Black Mesa

Après avoir atterri à Chicago, j'atteins ma destination par train : 36 heures et à peu près 2000 km pour atteindre l'Arizona, en traversant d'abord l'Illinois, le Missouri, le Kansas, le Colorado et le Nouveau-Mexique. Les paysages défilent : des cultures intensives laissent place aux plaines, puis aux steppes et finalement à des forêts de conifères géants à l'entrée à Flagstaff.

Deux jours plus tard, je rencontre finalement Mary, une des filles de Rena B. Lane, la grand-mère Navajo qui a accepté de m'accueillir pour les 3 prochains mois. Ensemble nous remontons 150 km au nord, jusqu'à Black Mesa. Lorsque Mary sort de la route et s'enfonce sur des chemins de plus en plus pentus et perdus au milieu des steppes, je commence à  paniquer : il fait nuit, et tout ce que je peux voir est que je ne vois rien. Je ne sais plus où je suis.

A travers la lumière des phares, j'aperçois une forme rappelant une flèche tordue en train de traverser le chemin. Je demande à Mary : "C'était quoi ça?" Elle me répond : "Un serpent à sonnette." De mieux en mieux...

Finalement, après ce qui me semble une éternité, nous arrivons. Fatigué et au bord de la crise de nerfs, je vais tout de même me présenter et dire bonsoir à la famille. J'entre dans la petite maisonnette rectangulaire en préfabriqué où Mary est rentrée quelques instants avant. A l'intérieur, une seule pièce fait office de chambre pour trois personnes, séjour et cuisine. Au centre, un vieux poële laisse filtrer la lumière d'un feu. Mary me dit alors "Chris, voici ma soeur aînée, Zena, et ma mère, Rena." Zena se lève pour me serrer la main et me souhaiter la bienvenue, puis m'invite à m'approcher pour serrer la main de la matriarche. Nos regards se croisent et, malgré la petite taille de cette dame, je me sens alors étrangement insignifiant. 

 

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Consultez dès maintenant le deuxième article de cette série ("Chez les indiens Navajos"), sur le début de mon apprentissage sur Black Mesa.  

Ce texte et les photos qui y figurent sont de Christophe Monplaisir (Genévrier), relu par Calenduline.

En plus de son activité d'auteur, Genévrier organise des stages pratiques sur les utilisations, l'identification et la cuisine des plantes sauvages comestibles.