C’est la pleine saison de l’ail des ours (Allium ursinum), la plante sauvage la plus connue et la plus cueillie.
A cette occasion, nombre de cueilleurs en herbe prennent le chemin des bois à la recherche de cette savoureuse sauvageonne, en quête d’un beurre aillé ou d’un succulent pesto…

La banalisation de cette plante cache pourtant quelques précautions à prendre, indispensables si l’on veut cueillir en toute sécurité.

 

ADO stage

 

Cueillir l'ail des ours : quelques précautions s'imposent...

PLAN DE L'ARTICLE


Reconnaître l'ail des ours

Confusion possibles

Les recommandations de cueillette

Après la cueillette

A propos de l'auteure de cet article

Ouvrage recommandé : Je cuisine l'ail des ours


 

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Reconnaître l’ail des ours

Où le trouver

L’ail des ours pousse en larges colonies, en milieu humide et ombragé ou semi-ombragé. On le trouve typiquement en forêt, en bord de ruisseau. Une odeur prononcée d’ail se dégage de la colonie : on ne doit toutefois pas déduire que l’odeur suffit à l’identification de la plante, car après avoir cueilli deux ou trois feuilles, les mains sentent tellement l’ail que n’importe quelle plante donnerait l’impression de porter cette odeur.

 

Les colonies d'ail des ours peuvent atteindre des tailles impressionnantes...

Les colonies d'ail des ours peuvent atteindre des tailles impressionnantes...

Son aspect

L’ail des ours pousse possède de longues feuilles entières (non dentées ou autres) et simples (non composées), très longuement pétiolées (le pétiole est une sorte de « queue » qui prolonge la partie verte de la feuille). Elles sont lancéolées et aiguës au sommet ; le pétiole est plat d’un côté et arrondi et de l’autre côté. Bien que poussant en touffes, les feuilles développées sortent individuellement de terre : on peut donc ramasser chaque feuille au « pied » du pétiole, au ras du sol.

 

feuilles ado

Feuilles d'ail des ours

 

Les fleurs arrivent environ un mois après la sortie des feuilles, au bout d’un long pédoncule (« tige » plus ou moins longue que peuvent porter les fleurs). Elles sont groupées en ombelles de fleurs blanches, et fructifient ensuite en 3 graines vertes, puis noires.

 

Fleurs d'ail des ours (Allium ursinum)

Fleurs d'ail des ours

 

Toutes les parties de l’ail des ours sont comestibles.

Confusions possibles

L’ail des ours peut se confondre avec plusieurs plantes mortelles, qui peuvent pousser au sein de la colonie. Il est donc indispensable de pouvoir le différencier de ces cousines, indésirables dans notre cueillette !

 

=> Le muguet (Convallaria majalis), mortel à faible dose, et qui affectionne des habitats similaires à ceux de l’ail des ours : ses feuilles sont plus épaisses au toucher ; de plus elles poussent par deux, l’une étant clairement enroulée autour de l’autre.

 

Colonie de muguet (Convallaria majalis)

Colonie de muguet, qui a également élu domicile en sous-bois humide...

 => Le colchique d’automneColchicum autumnale), mortel à faible dose : ses feuilles sont plus épaisses et plus arrondies au sommet que celles de l’ail des ours ; elles poussent en touffes et sortent de terre groupées (contrairement à l’ail des ours, dont les feuilles, à maturité, sortent de terre individuellement). Au printemps, elles entourent le fruit (une capsule), qui est tout d’abord sous-terrain. Le colchique croît dans les prairies de montagne : on le trouvera mélangé à l’ail des ours lorsque ce dernier développe des colonies en lisière de bois.

 

=>  L’arum maculé (Arum maculatum), toxique : les feuilles de ce dernier ne ressemblent pas à celles de l’ail des ours, mais sont d’un vert tout à fait similaire. Etant donné que cette plante s’immisce dans les colonies d’ail des ours, elle peut facilement être cueillie par inadvertance par une personne qui cueillerait par brassées.

 

Arum (Arum maculatum) en sous-bois

Arum en sous-bois

 

Les recommandations de cueillette

- Ne jamais cueillir par brassées : cette méthode ne permet pas d’identifier les feuilles individuellement et augmente les risques de cueillir par inadvertance d’autres plantes qui pousseraient au sein de la colonie.

 

Arum parmi une colonie d'ail des ours

Cueillir par brassées augmente considérablement le risque de cueillir par inadvertance cette feuille d'arum,

qui s'est glissée dans une colonie d'ail des ours.

 

-    Cueillir les feuilles à maturité, individuellement, et au ras du sol : de cette manière, il n’est pas possible de confondre les feuilles avec celles du muguet ou du colchique d’automne, qui ne sortent jamais de terre individuellement.

Muguet en fleurs

 

Les feuilles de muguet poussent par deux, l'une étant enroulée autour de l'autre.

 

-  En montagne : s’abstenir de cueillir en lisière, pour écarter tout risque de confusion avec le colchique d’automne.

 

-Passée la première feuille : ne pas se fier à l’odeur pour l’identification. Les mains portent en effet immédiatement une forte odeur d’ail, ce qui donne l’impression que n’importe quelle autre plante porte aussi cette odeur.

Après la cueillette

De nombreuses personnes consomment l’ail des ours cru ; or ce dernier peut pousser en zone contaminée par l’échinococcose (Echinococcus multilocularis).

 

Cueillette d'ail des ours

Les cueillettes d'ail des ours sont généralement importantes : peut-on les manger crues ?

Tout dépend du lieu de cueillette.

Qu'est-ce que l'échinococcose ?

 

Cette zoonose n’est au départ pas destinée à l’homme : le cycle complet passe par un hôte intermédiaire, qui ingère les œufs (qui éclosent et forment alors des larves), et un hôte définitif (un canidé, ou, plus rarement un félidé), qui, en mangeant l’hôte intermédiaire, ingère les larves. Ces dernières se transforment en adulte dans le système digestif des hôtes, où elles pondent des œufs, qui sont alors relargués dans les crottes, afin de contaminer à nouveau un hôte intermédiaire, etc.

 

Comment l'homme peut-il être contaminé ?

 

Ce sont donc les crottes des chiens ou des renards qui portent les œufs susceptibles de contaminer l’humain. Déplacés sur des plantes voisines (ruissellements dûs à la pluie, déplacement en s'accrochant à la fourrure d'un animal, etc.), ils peuvent alors accidentellement contaminer l'homme si ces plantes en question sont ingérées. Etant donné que les humains sont rarement mangés par des canidés (!), ils constituent une impasse biologique pour le parasite. Chez une personne au système immunitaire un peu affaibli, la larve traverse la paroi du tube digestif et s’installe dans un organe (en général le foie), où elle se développe de manière asymptomatique. Ce n’est que plusieurs années plus tard (10 à 20 ans) que la maladie est détectée, alors qu’elle a déjà fait de nombreux dégâts.

 

Qui est à risque ?

Les cueilleurs sont loin d’être les personnes les plus exposées à la maladie (contrairement aux propriétaires de chiens non vermifugés ou aux agriculteurs par exemple). D’autre part, la maladie n’est pas présente sur tout le territoire : c’est la façade est du pays qui est principalement concernée (voir les cartes de contamination).

 

Si le lavage permet d’éliminer une partie des œufs, seule la cuisson à 60°C garantit des aliments indemnes de risques. En zone contaminée, et dans un lieu susceptible d’être fréquenté par des animaux contaminés, il est donc recommandé de faire cuire à 60°C au moins les feuilles et les fruits ramassés au sol. Les fleurs, dont la durée de vie est moindre, présentent un risque bien inférieur, puisqu’elles ont été exposées moins longtemps que les feuilles par exemple.

 

En ce qui concerne l’ail des ours, il existe de nombreuses recettes savoureuses à base de feuilles cuites : pensez cependant à ne pas faire cuire les feuilles trop longtemps, afin de ne pas perdre leur goût, et à ne pas les faire blanchir (tout leur parfum partirait alors avec l’eau). Röstis, lasagnes orties/ail des ours, quiches, soupes : à vous de jouer !

 

Choux à l'ail des ours

Choux à l'ail des ours : bon appétit ! :)

Texte : Caroline "Calendula", photos et relecture :  Christophe Monplaisir (Genévrier)

Copyright @L'Aventure Au Coin Du Bois 2015

A propos de l'auteure de cet article

Formée au Collège Pratique d’Ethnobotanique de François Couplan, co-auteure du Petit Traité Rustica des plantes sauvages comestibles, Caroline "Calendula" est membre fondateur du collectif l’Aventure au Coin du Bois, au sein duquel elle est directrice éditoriale des Cahiers Pratiques & Sauvages et auteure de nombreux articles portant sur les plantes sauvages et leurs utilisations. Elle propose également avec l'association le Tilleul & l'Eglantier des stages, ateliers et sorties sur le terrain pour apprendre à identifier et à cuisiner les plantes locales.
 

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Le collectif L'Aventure Au Coin Du Bois ne saurait être tenu responsable des dommages éventuels causés par erreur d'identification ou par utilisation inappropriée des plantes. Les lecteurs consommant des plantes sauvages ou pratiquant les techniques décrites dans nos Cahiers et sur notre site sont seuls responsables de leurs actes et de leurs conséquences. La consommation de certains végétaux ou la pratique de certaines activités peuvent être déconseillées dans certains cas (allergies, maladies cardiaques, rénales, etc.). Il convient donc de se connaître soi-même afin de prendre les précautions nécessaires et d'éviter tout accident. © L'Aventure au Coin du Bois, 2015. Tous droits réservés.